Anatomie poétique
La poésie fait partie de ma vie, elle m'aide à traverser les jours. Chaque matin, je lis un poème et le laisse se diffuser dans mon corps... parfois une photographie apparait, parfois des mots. Cet album est le nectar de cette rencontre...
« Je suis un gardeur de troupeau le troupeau ce sont mes pensées Et mes pensées sont toutes des sensations. Je pense avec les yeux et avec les oreilles Et avec les mains et avec les pieds Et avec le nez et avec la bouche. Penser une fleur c’est la voir et la respirer Et manger un fruit c’est en savoir le sens. C’est pourquoi lorsque par un jour de chaleur Je me sens triste d’en jouir à ce point. Et couche de tout mon long dans l’herbe. Et ferme mes yeux brûlant Je sens tout mon corps couché dans la réalité Je sais la vérité et je suis heureux » Fernando Pessoa
Ange plein de gaieté, connaissez-vous l'angoisse, La honte, les remords, les sanglots, les ennuis, Et les vagues terreurs de ces affreuses nuits Qui compriment le coeur comme un papier qu'on froisse ? Ange plein de gaieté, connaissez-vous l'angoisse ? ... Ange plein de santé, connaissez-vous les Fièvres, Qui, le long des grands murs de l'hospice blafard, Comme des exilés, s'en vont d'un pied traînard, Cherchant le soleil rare et remuant les lèvres ? Ange plein de santé, connaissez-vous les Fièvres ? ... Baudelaire
Je puise les mots dans la terre Ils traversent mon corps de chair S’entrechoquent au rythme organique Se déshabillent et se glissent tel un murmure Dans le palais de ma bouche La chair des mots
La vie voyage; poème de Andrée Chedid Aucune marche Aucune navigation N'égalent celles de la vie S'actionnant dans tes vaisseaux Se centrant dans l'îlot du cœur Se déplaçant d'âge en âge Aucune exploration Aucune géologie Ne se comparent aux circuits du sang Aux alluvions du corps Aux éruptions de l'âme Aucune ascension Aucun sommet Ne dominent l'instant Où t'octroyant forme La vie te prêta vie Les versants du monde Et les ressources du jour Aucun pays Aucun périple Ne rivalisent avec ce bref parcours Voyage très singulier De la vie Devenue Toi.
"Le soleil était là et tu as hésité maintenant il te faut attendre dans l'obscurité" Goliarda Sapienza
"J'ai passé ma jeunesse à chercher la beauté, j'ai trouvé la beauté en perdant ma jeunesse..." Lydie Dattas
« Je me tiens comme la terre m’a créée avec la poésie de mes forêts et le vent de mes blessures ... Dans la modestie de mon humanité avec tout ce que l’âge a inscrit en moi de connaissances ... je me débarrasse de l’inutile des écorces qui m’alourdissent ... Devant vous je me dénude Doigt Par doigt Ongle par ongle Peau Puis os Puis poème » Maram al-Masri, poétesse syrienne
« le même fleuve de vie qui court à travers mes veines jour et nuit, court à travers le monde et danse en pulsations rythmées. C’est cette même vie qui pousse à travers la terre sa joie en d’innombrables brins d’herbe, et éclate en de fougueuse vagues de feuilles et de fleurs… Je sens mon corps glorifié au toucher de cette vie universelle, car ce grand battement de la vie des âges , c’est dans mon sang qu’il danse en ce moment. » Tagore
Tous les détails du monde sont des amants. Et chaque détail de l'univers d'un visage est grisé. Mais leur secret, à toi, Ils ne le disent pas. Sauf à qui le méritent, interdit, le secret. Si le ciel n'était pas lui aussi amoureux, sur son cœur ne serait aucune pureté. Si le soleil aussi n'était pas amoureux, lumière ne serait posée sur sa beauté. Et si terre et montagne N'étaient pas amoureuses, Au cœur de l'une et l'autre Plante ne pousserait. Et si la mer était Sans connaître l'amour, Elle aurait, à la fin, Un lieu pour se reposer. Rumi
Nous sommes habitués à ne nous servir de nos yeux qu’avec le souvenir de ce qu’on a pensé avant nous sur ce que nous contemplons”, déplorait Guy de Maupassant. “il y a, dans tout, de l’inexploré. La moindre chose contient un peu d’inconnu. Trouvons-le... Il s’agit de regarder tout ce qu’on veut exprimer assez longtemps et avec assez d’attention pour en découvrir un aspect qui n’ait été vu et dit par personne.”
Il plongea sa main dans la vasque et humecta ses lèvres. Ce fut comme si un souffle spirituel le pénétrait : au plus profond de lui-même il sentit renaître la force et la fraîcheur. Il lui prit une envie irrésistible de se baigner : il se dévêtit et descendit dans le bassin. Alors il lui sembla qu’un des nuages empourprés du crépuscule l’enveloppait ; un flot de sensations célestes inondait son cœur ; mille pensées s’efforçaient, avec une volupté profonde, de se rejoindre en son esprit ; des images neuves, non encore contemplées, se levaient tout à coup pour se fondre à leur tour les unes dans les autres et se métamorphoser autour de lui ... NOVALIS, Henri d’Ofterdingen, Ed. Montaigne.