COMMISSARIAT GENERAL
Collectif VOID (Arnaud Eeckhout et Mauro Vitturini), Laurence Vray, Boris Iori, Evelyne Gilmont, Xavier Roland et Sophie Simon.
Laurence Vray
Travail sur les archives de Mons pour l’exposition « Pulsations. Visages d’une Cité »
Le fil de la vie
La fenêtre, cet objet quotidien et discret, symbolise profondément l’ouverture sur le monde et la transmission de mémoire. À travers cette série de trois fenêtres, j’invite le spectateur à plonger dans des images anciennes de la région de Mons, imprimées sur verre. Le choix de ce médium renforce l’idée de transparence, de passage du temps, où chaque reflet dans le verre devient une invitation à lier passé et présent. L’eau, élément central de cette réflexion, est un témoin privilégié des transformations sociales et culturelles qui ont façonné cette région. Elle incarne à la fois la vie quotidienne, les rassemblements populaires, et la mémoire des anciens, inscrite profondément dans le paysage montois.
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, deux cours d’eau traversaient Mons : la Haine et la Trouille. Ces rivières, loin d’être de simples éléments naturels, ont joué un rôle fondamental dans l’histoire de la ville. Utilisées pour l’approvisionnement en eau et pour de nombreuses activités économiques, elles étaient au cœur des échanges et des rencontres. Cependant, pour des raisons d’hygiène et d’urbanisation, elles ont été détournées, mais leur héritage persiste dans la mémoire collective des habitants. Aujourd’hui, alors que l’eau est devenue un enjeu socio-économique majeur, notamment en raison des préoccupations environnementales et des défis liés à la gestion des ressources, cette mémoire ancienne résonne avec une intensité particulière. Elle nous rappelle que le rapport à l’eau, hier comme aujourd’hui, façonne les paysages, les sociétés et les modes de vie.
En complément de cette évocation des cours d’eau, j’ai choisi de mettre en lumière deux photographies anciennes qui témoignent des premiers congés payés des ouvriers. À une époque où seuls les plus privilégiés pouvaient se permettre de partir en vacances, les familles ouvrières se retrouvaient souvent exclues de ce privilège. Tandis que les élites s’évadaient vers la côte belge, des solutions locales ont été imaginées pour offrir des moments de détente aux travailleurs. C’est ainsi qu’Asquillies, un petit village de la région, a vu naître des zones de loisirs populaires.
Asquillies Plage, avec son petit bassin, devenait un lieu de rencontre et de plaisir pour les familles de la classe ouvrière. On y venait pour se baigner, faire du canotage et partager des repas en famille ou entre amis. Les bals musettes organisés dans cet endroit créaient une atmosphère conviviale et festive, où la musique et la danse permettaient aux travailleurs de s'évader, même si brièvement, de la dureté du quotidien. Ces lieux de loisirs, simples mais empreints de joie, sont des symboles de résilience et de solidarité, offrant un contraste frappant avec la fracture sociale qui existait à l’époque.
Ainsi, à travers ces archives et ces témoignages visuels, c’est un portrait de la ville de Mons que je souhaite offrir, un portrait à la fois intime et collectif, fait de mémoire, de résistance et d’espoir.